En découvrant « Expensive shit », on croit reconnaître un lointain cousin du Jazz éthiopien à la Mulatu Astatke. Mais c'est bien le grand, l'immense Fela qu'on entend ici, lui qui a pour habitude de composer des morceaux de plus de dix minutes. Fela Kuti dénoncera tout au long de sa vie la corruption, la dictature militaire Nigériane des années 70 et 80, la misère sociale du pays qui est parmi le plus peuplé d'Afrique. A travers son art il sera un opposant politique au sens plein du terme, farouche, féroce, opiniâtre, courageux. Il sera souvent censuré, emprisonné. En 1978 sa maison est rasée par un raid militaire commandité par le gouvernement. Il franchit le pas de l'engagement politique et créée le Movement of the People en vue de l'élection présidentielle de 1983. Deux ans avant l'échéance il sera de nouveau emprisonné pour détention illégale de cannabis. En 1985 il réalise un véritable tour de force : « Army arrangement » dévoile un scandale financier dans lequel est impliqué le gouvernement militaire alors au pouvoir. Le Canard Enchainé dans une chanson : c'est possible ! Expensive shit fut composé après un épisode un peu trivial : en 1974, Fela est arrêté toujours pour détention de cannabis, et parvient à avaler l'objet du délit. Il est alors détenu jusqu'à expulsion naturelle de la preuve de la faute. Fela Kuti, c'est rien de moins que I'inventeur universel de l'afrobeat, et un opposant à l'oppression jamais abattu. Ses fils Seun et surtout Femi ont repris le flambeau, qui diffusent aujourd'hui ses inventions et ses combat à travers le monde. A la mort de Fela en 1997, le gouvernement décrète quatre jours de deuil national, avec toute l'ironie qu'il y a à honorer la disparition d'un homme qui anima les luttes sociales des faibles contre les forts pendant des décennies entières.
Mr Moka
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