L'autre jour j'ai revu Philadelphia à la télévision. Ce film est rare car il n'est jamais facile de traiter de sujets portant sur la maladie, surtout si cette dernière survient brutalement, s'invitant au seuil de la vie en la refermant dans les couloirs d'un hôpital. Non, il n'est pas chose aisée sans verser dans le pathos, l'impudique ou le clinique, aux versants de la passion et de la raison, des émotions et des mots. En ce sens, une oeuvre peut devenir catharsis, la démarche en tout cas un exutoire. Sans doute cette approche a meut le projet de Peter Silberman. Touché dans son passé par la mort violente d'un de ses proches, sujet à l'injustice et la soudaineté, l'artiste de Brooklyn, par le truchement d'Hospice, troisième album des Antlers qui relate le lien entre un soignant et son patient jusqu'au décès de ce dernier, a entre-ouvert la porte de ses pensées et de ses névroses. Sans larmoiement et toute en retenue, l'artiste nous expose ses doutes, sa violence contenue, les échanges, entre peurs et espoirs, avec cet autre, proche mais qui s'éloigne peu à peu (sublime « Two », mitan et pivot de cet album), jusqu'à l'épilogue, drame noir vicié dans ce cadre blanc asceptisée. La voix de Silberman, comme un écho aux instants, possède les reflets d'un Anthony Hegarthy et autre Perfume Genius quand la mélancolie point (Kettering) et les atours de Tom MacRae ou Patrick Watson quand les émotions se font plus exacerbées (Bear). Les arrangements, épurés et tout en variation, à rapprocher du style Slowcore, de la quiétude des choeurs (Prologue) aux envolées progressives, par l'emplois de claviers, cordes ou cuivres (Sylvia), soulignent parfaitement les divers affects qui fluctuent et poignent les protagonistes, entre espoir, colère et résignation. Onguent de Silberman, Hospice témoigne comme rarement que la lumière peut subsister là où ne devrait exister que sombreur.
Mr Blue
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